Le UK Pirate party, proche du Parti pirate suédois, a été officiellement reconnu le 11 août comme parti politique par les autorités britanniques, et pourra donc présenter des candidats aux législatives de 2010. Entretien avec son président, Andrew Robinson, un graphiste de 40 ans qui a commencé à s'intéresser au droit d'auteur en tant que musicien amateur.
Le Parti pirate suédois a annoncé, jeudi, qu'il présenterait des candidats aux élections locales et aux législatives prévues en 2010. Le dernier sondage le crédite de 2,9 % d'opinions favorables, en baisse de 1,3 %.
Quelles sont les principales positions du Parti pirate britannique ?
Il y a trois sujets sur lesquels nous nous concentrons, et qui tous ont un rapport avec le fait que pour nous, le droit britannique est en retard sur son temps et n'a pas su s'adapter aux évolutions technologiques. Nous demandons une réforme des lois sur les brevets et le droit d'auteur pour réduire les pouvoirs des ayants droit ; une meilleure protection de notre liberté d'expression ; et la fin de la surveillance et du fichage abusifs mis en place par le gouvernement. Nous ne défendons pas l'abolition du droit d'auteur, mais nous pensons qu'il doit être adapté.
L'une de vos dernières campagnes s'intitule "légalisez 'Joyeux anniversaire'"...
D'après la loi britannique, vous devez théoriquement verser des royalties à la Recording Industry Association of America pour avoir le droit de chanter "Happy birthday to you". La chanson est soumise au droit d'auteur jusqu'en 2030 ! Pour nous, c'est une des preuves que le droit d'auteur, dans sa forme actuelle, est inadapté à notre société, et est exagérément favorable aux grandes entreprises. En moyenne, la durée des droits d'auteur augmente de plus d'un an chaque année : si cette tendance se poursuit, aucune œuvre ne tombera plus jamais dans le domaine public.
Vous utilisez le même logo et le même nom que les Partis pirates suédois et allemand. S'agit-il d'un seul et même parti décliné dans plusieurs pays ?
Non, nous sommes des partis différents, mais avec des buts communs. Nous ne sommes pas officiellement liés, mais nous partageons une certaine vision politique. Nous sommes de petits partis : comme nos homologues allemands, nous tablons sur environ cinq mille membres d'ici l'an prochain.
Dans le système politique britannique, il est très difficile pour les petits partis d'obtenir des élus. Présenterez-vous des candidats aux législatives de 2010 ?Oui, nous présenterons des candidats aux législatives. Nous savons bien qu'il est quasiment impossible pour nous d'obtenir des députés ; mais c'est la meilleure manière de faire en sorte que les sujets qui nous tiennent à cœur soient au centre du débat. Les grands partis ne se sont pas découvert un intérêt soudain pour l'écologie ces dernières années ; ils ont surtout compris que s'ils ne se préoccupaient pas d'environnement, le Green Party [le principal parti écologiste britannique] allait leur prendre des voix. Nous ne nous attendons certes pas à gagner les élections, mais nous espérons qu'en présentant des candidats, nous ferons en sorte que nos propositions soient écoutées et deviennent des lois.
Aux élections européennes, le Parti pirate suédois a obtenu 7 % des voix et un député. Mais il avait bénéficié d'une large publicité après le procès du site de téléchargement Pirate bay, dont les créateurs ont été lourdement condamnés juste avant les élections. Vous ne bénéficierez pas de la même exposition...
Bien sûr, le succès du Parti pirate suédois s'explique en partie par la couverture médiatique et l'indignation après le procès de The pirate Bay. Mais il va se produire la même chose en Grande-Bretagne : le rapport Digital Britain, qui vient d'être remis au gouvernement, préconise une amende de 50 000 livres [environ 58 000 euros] pour les personnes qui téléchargent illégalement.
Lorsque les premiers procès auront lieu, le grand public se rendra rapidement compte que c'est injuste et tout simplement inapplicable. Début 2010 doit également se tenir le procès Oink, un site de téléchargement britannique, quelques mois avant les élections. Nous pensons que ce procès popularisera nos idées comme le procès Pirate Bay l'a fait pour le Parti pirate suédois.Damien LELOUP pour
Le Monde du 13 Août